vendredi 27 novembre 2009

Duchenne de Boulogne (1806 - 1875)

Guillaume-Benjamin-Amand Duchenne, dit Duchenne de Boulogne (du lieu de sa naissance) occupe une position originale tant au sein d'une histoire de la médecine qu'au sein d'une histoire de la photographie.

C'est en 1842 alors qu'il habite encore Boulogne-sur-mer que le médecin s'empare de l'électricité, pratiquant alors l'électropuncture : des aiguilles implantées au sein des organes y favorisent la circulation de courants électriques. L'originalité de Duchenne fut d'obtenir la contraction de muscles sans inciser la peau, tout en limitant l'étendue des effets électriques à un ou deux d'entre eux. Le procédé expérimental de cette " électrisation localisée " est intéressant : rares en effet sont les muscles susceptibles de se contracter isolément sous la simple emprise de la volonté.

En 1862, Duchenne publie deux ouvrages illustrés de photographies : Mécanisme de la physionomie humaine ou analyse électro-physiologique de l'expression des passions et un Album de photographies pathologiques complémentaire du livre intitulé De l'électrisation localisée, publié en 1855 et réédité depuis. Le second de ces ouvrages est consacré à la photographie de patients atteints de maladies musculaires. Le premier, organisé en une " partie scientifique " et une " partie artistique ", comprend des portraits de patients dont le visage est animé d'expressions obtenues par électrisation localisée. Ainsi sont figurées la terreur, la joie, la bienveillance… Duchenne de Boulogne apparaît lui-même souvent à l'image, appliquant les deux réophores sur des visages d'hommes, de femmes et même sur celui d'une enfant. Cette rencontre entre le visage, la médecine, l'électricité et la photographie, n'a guère de suite. Duchenne de Boulogne publie bien lui-même en 1865 un nouvel ouvrage illustré de photographies mais il s'agit cette fois de photographies de coupes de tissus nerveux réalisées sous microscope.

Ce qu'enseigne le médecin est à l'opposé des théories physiognomoniques qui confondent apparence et sentiments. Ici, le visage n'est qu'un ensemble de mécanismes. La photographie sert simultanément la réalisation d'une cartographie musculaire scientifique et l'enseignement artistique des expressions du visage. Douze ans après le Mécanisme de la physionomie humaine, paraît la traduction française du livre de Darwin, L'Expression des émotions ches l'homme et chez les animaux. Darwin réutilise là certaines photographies de Duchenne de Boulogne.

Le nom de Duchenne de Boulogne marque la médecine contemporaine. Grand médecin, promoteur de la médecine clinique, il a notamment décrit la paralysie spinale infantile, la paralysie labio-glosso-laryngée, l'ataxie locomotrice progressive (le tabès). Il fut surtout le premier à décrire la " paralysie pseudo-hypertrophique " à l'évolution dramatique, la " myopathie de Duchenne " comme on la nomme, première grande affection héréditaire de l'enfance dont le gène a été identifié.

Monique Sicard

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